Origine et histoire du Centre hospitalier
L'ensemble hospitalier du centre Gérard-Marchant a été construit par l'architecte Jacques-Jean Esquié entre 1852 et 1864, selon les théories psychiatriques d'Esquirol et à partir d'un projet non réalisé pour un asile à Bruxelles. Il forme un ensemble urbain organisé autour de la fonction psychiatrique, structuré par deux axes de symétrie nord-sud et est-ouest. À leur croisement se trouve la cour d'honneur qui abritait les services administratifs et qui, précédée d'un portique monumental, mène à une chapelle mêlant styles classique et néogothique. Cette chapelle comporte deux nefs séparées par des piliers destinées à la séparation des malades selon leur sexe. À l'ouest, un bâtiment en hémicycle centré sur le château d'eau accueillait les ateliers. L'axe nord-sud dessine le parcours des malades le long de cours plantées et deux ensembles de pavillons, au nord et au sud, étaient consacrés respectivement aux hommes et aux femmes et répartis par type d'affection. Un système complexe de galeries couvertes assurait la communication entre l'administration et les pavillons, mais il a presque entièrement disparu. Le plan symétrique et hiérarchisé s'accompagnait d'une grande qualité architecturale : façades colorées, arcades en plein cintre, pavillons pittoresques et jardins à l'anglaise. La chapelle a reçu un décor peint par Alexandre Denuelle et l'ensemble présente des éléments toulousains comme les mirandes et le souvenir du plan des Jacobins. Les matériaux locaux — briques de grand format à tonalité rose-orangé et tuiles creuses — caractérisent cet exceptionnel ensemble architectural toulousain. Un médaillon en hommage à l'aliéniste J.-E.-D. Esquirol domine l'arc d'entrée vers la cour d'honneur.
L'établissement porte le nom du docteur Gérard Marchant, médecin toulousain, élève de Jean-Baptiste Delaye, qui participa à la construction de l'asile de Braqueville, en devint le premier directeur et y laissa une empreinte profonde. Marchant déclara : « Mon existence à Toulouse n'a été consacrée qu'à une pensée unique, la construction d'un asile. » L'asile ouvrit ses portes le 1er juillet 1858 avec 260 aliénés transférés de La Grave, alors que les travaux n'étaient pas encore terminés en raison de retards liés au manque de crédits et à l'augmentation des coûts. La main-d'œuvre du chantier fut abondante et inclut des malades de La Grave, et l'ouvrage reçut le deuxième prix à l'Exposition universelle de Paris en 1867. Maurice Dide succéda en juin 1909 à Paul Dubuisson à la direction médicale et occupa cette fonction jusqu'en novembre 1936, à l'exception de la période 1915-1919. L'hôpital fut gravement endommagé durant la Seconde Guerre mondiale, dans la nuit du 1er au 2 mai 1944, puis par l'explosion de l'usine AZF le 21 septembre 2001, qui fit trente morts et environ 2 500 blessés. À la suite de l'explosion, le centre fut entièrement évacué : 350 patients trouvèrent un hébergement dans 44 structures de la région et le personnel poursuivit les soins dans des établissements d'accueil parfois éloignés, entraînant un long exil des patients et des soignants. La catastrophe contraignit l'établissement à restructurer son offre de soins et à transformer sa physionomie architecturale, en remplaçant notamment les pavillons du XIXe siècle par de nouveaux locaux de plain-pied répartis dans le parc. Au deuxième trimestre 2002, six pavillons rouvraient sur site et 120 lits furent installés à l'hôpital Larrey ; en décembre 2005, sept pavillons d'admission furent ouverts au 134 route d'Espagne et la réhabilitation des services administratifs et techniques s'acheva en 2012. L'établissement dispose depuis 2012 d'une unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA).
Le centre hospitalier spécialisé Gérard-Marchant est aujourd'hui un établissement public départemental de santé qui s'adresse à la population de la Haute-Garonne : plus de 1 200 agents assurent le suivi de 13 165 patients au sein de structures réparties sur l'ensemble du département. Le site historique du 134 route d'Espagne est dédié à l'hospitalisation à temps complet, mais, conformément aux évolutions en psychiatrie, moins de 20 % des patients suivis par le centre font l'objet d'une hospitalisation. Les services, présents sur le site et sur tout le territoire départemental, couvrent la psychiatrie générale, la psychiatrie infanto-juvénile et la psychiatrie en milieu pénitentiaire ; ils prennent en charge des publics variés — adolescents, adultes, seniors, détenus — ainsi que leurs familles, et s'appuient sur des soins somatiques assurés par une équipe de médecins généralistes. La modernisation des prises en charge a entraîné une forte réduction du nombre de lits d'hospitalisation, autour de 300 aujourd'hui contre plus de 1 000 il y a cinquante ans, au profit de consultations de proximité, d'hôpitaux de jour, de centres d'accueil thérapeutique à temps partiel, de centres de post-cure et d'appartements thérapeutiques. Le budget moyen annuel de l'établissement est d'environ 65 millions d'euros.
À partir de 2023 l'hôpital a connu des difficultés croissantes : la Chambre régionale des comptes d'Occitanie a publié le 11 juillet 2024 un rapport pointant des dysfonctionnements, une offre de soins publique insuffisante, des délais de consultation longs, des urgences saturées, des difficultés de recrutement, une surcharge du personnel et des problèmes de sécurité ; l'Inspection générale des affaires sociales a été saisie en 2024 et a formulé quatorze recommandations. Sur la même période, le personnel a alerté en décembre 2023 sur des locaux délabrés, des coupures d'électricité et des problèmes d'hygiène, et plusieurs incidents ont été signalés en 2024, notamment des départs de feu (23 mars et 24 septembre) et des agressions, entraînant évacuations et blessures. Selon des syndicats, l'établissement connaît deux à trois départs de feu par an. Les façades et toitures des bâtiments administratifs bordant la cour d'honneur, le bâtiment en hémicycle à l'ouest de la chapelle, les pavillons des malades longeant les allées nord et sud avec leurs galeries de circulation, les restes de galeries transversales et de pavement en calade, la chapelle dans son intégralité et la cage d'escalier au nord-ouest du bâtiment administratif nord avec sa rampe en ferronnerie sont inscrits au titre des monuments historiques depuis le 28 mai 2008 ; le château d'eau conçu par Pierre Debeaux en 1963, en béton armé, avec un réservoir de forme icosidodécaèdre porté par une colonne de plan décagonal, bénéficie du label « Patrimoine du XXe siècle » depuis 2017.